Page 6 - Charles Fort - J'ai tout gâché
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J’ai tout ĝch́, 4




Madeline ́tait fiǵe sur la sc̀ne; elle 


manquait de coordination et parlait d’une 

voix stridente, comme une craie crissant sur 


l’ardoise. Elle avait la d́marche saccad́e d’une 


paire de ciseaux et ses gestes avaient autant de 

sens que les secousses d’une brasśe de linge 


au vent. Mais au lieu de diviser ́quitablement 


les «jeu cŕdible», «interpŕtation ŕaliste» et 

«intensit́ dramatique» entre les acteurs, je 


couvris Madeline de tous ces ́loges ̀ la fois, et 

je l’aurais orńe d’autres phrases si j’en avais 


eu en ŕserve. Car elle m’avait appeĺ un 


critique, et j’́tais d́sormais voú, de corps et 

de machine ̀ ́crire, ̀ Madeline Firscape.



C’́tait agŕable de « faire partie » de quelque 


chose. Plusieurs soirs, alors que le ŕdacteur en 

chef m’envoyait assister ̀ des discours et ̀ des 


rassemblements de toutes sortes, j’allais plut̂t 


voir Madeline, puis je retournais au bureau 

pour ́crire les articles command́s comme si 


j’avais ́t́ l̀ ò je devais ̂tre. Et avec le vieux 

Firscape, je m’entendais de mieux en mieux, 


l’acclamant haut et fort chaque fois qu’il gagnait 


un degŕ dans son cercle, le regardant humble- 

ment ̀ mesure qu’il se dressait, puissant par- 


dessus les superlatifs et la foule conquise.



Un jour, le journal me confia la ŕdaction 

d’articles sur une grande foire religieuse : je dus
















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